Histoires de fontaines sud-bigoudènes

Plomeur, commune aux 100 fontaines

Dans son mémoire1 consacré aux fontaines du Sud-Ouest du Pays bigouden, Mireille Andro effectue « un véritable retour aux sources » en dressant un inventaire exhaustif de ces lieux où, « de tradition millénaire », on allait puiser l’eau, élément indispensable à la vie. La commune actuelle de Plomeur compte donc, en 1994, 100 fontaines recensées : 67 existantes, 5 comblées, 24 détruites et 4 sous forme de toponymes. A Treffiagat, elle en compte 22 : 13 existantes, 1 comblée, 6 détruites et 2 toponymes.

La fontaine de ND de Treminou, haut-lieu de la révolte des bonnets rouges.

Quant à Guilvinec (section de Plomeur qui constituera en 1880 la commune de Guilvinec), on y trouve 12 : 4 existantes, 1 comblée, 7 détruites. Il est intéressant de mettre ces chiffres en parallèle avec les 115 villages de Plomeur, dont 12 à Guilvinec, ce qui permet de conclure que chaque village a sa fontaine ou que chaque point d’eau de la commune a vu la population s’y fixer et créer un hameau.

Les fontaines de Guilvinec

  • Kerfriant, détruite vers 1930, pas de consommation humaine ; un puits aujourd’hui condamné avant le cimetière.
  • Kergoz, détruite vers 1960, à l’ouest du manoir ; elle alimentait un lavoir et un abreuvoir à vaches. Il existait aussi un puits dans la cour du manoir.
  • Kermeur, existante ; n’a pas tari lors de la sécheresse de 1976 ; située à 80 m au sud du menhir ; un lavoir situé près du ruisseau est aujourd’hui détruit.
Fontaine de Lanvar (près de la ferme de Kermeur)
  • Saoul Kanap Du (Eteule de chanvre noir)2; comblée, recouverte par le gymnase Manu Berrou.
  • Kervennec, détruite ; 1 m de profondeur, margelle en granit, tarie en été. Toutes les fermes avaient un puits ; deux lavoirs indépendants.
  • Le Ménez, détruite en 1950, à l’ouest de l’atelier municipal ; son eau est « consommable », mais devient salée par remontées de l’eau de mer lors des grandes marées.
  • Feunteun Mari-Anna ar Poul, du nom d’une lavandière populaire dans le quartier (sud du stade de Lagat-Yar), de construction récente (en 1970 par Xavier Cossec). On peut cependant imaginer qu’une source existait déjà bien avant à cet endroit.
  • Un lavoir dans le même secteur, détruit vers 1970.
  • Poul-ar-Palud, place du 14 Juillet, lavoir de la place, détruit.
Le lavoir de Poul-ar-Palud, aujourd’hui sous la place du 14 juillet
  • Poriguénor, à l’ouest de la ferme, à 7 m de l’avenue de la République ; existe encore ainsi qu’un lavoir à 3 m de là. Autrefois, il existait un puits, aujourd’hui recouvert par la route ; là aussi, on note des remontées d’eau de mer lors des grandes marées. [Le toponyme indique un ancien marais salant ; voir article microtoponymes de Guilvinec]
  • Saint-Trémeur, une fontaine détruite au sud de la chapelle, côté Kerléguer, sur le chemin.
  • Saint-Trémeur, une fontaine existante, récemment rénovée et enjolivée, alimentait le hameau de Prat-an-Ilis.
La fontaine de Saint-Trémeur

Une autre fontaine située sur le territoire de Plomeur est très voisine de Guilvinec : celle de Lagat-Yar.

Une légende liée à la présence d’une résurgence

Comme pour la ville d’Ys, mais à plus petite échelle, une anecdote lie à la montée des eaux une cérémonie druidique ancienne qui aurait perduré jusqu’au XVIIIe siècle. Un lieu de culte très ancien serait donc situé dans la baie de Men-Meur où serait englouti un site mégalithique, sans doute, près d’une source ou d’une fontaine. Albert Clouard rapporte cette légende :

« Par les temps clairs, entre Guilvinec et Penmarc’h, on voit à travers les vagues de larges tables de pierre qui n’étaient autre, prétend-on, que les autels de la cité détruite. Il y a un demi-siècle, les prêtres, accompagnés de toutes les barques du rivage, allaient chaque année en bateau dire la messe au-dessus de ces ruines. »

Sébillot, rajoute, citant Cambry : « Avant 1789, le clergé allait en procession au dolmen de Sainte-Madeleine (Charente-Inférieure), et, vers la même époque, on disait la messe en bateau, au-dessus de pierres druidiques, que l’on apercevait, à quinze pieds sous l’eau, entre Le Guilvinec et Penmarc’h. »

Si l’on observe bien la carte marine du SHOM, on peut distinguer une confluence d’anciens ruisseaux sous la mer. Elle coïnciderait avec la résurgence d’une ancienne source que cite Mireille Andro dans son mémoire. Elle pourrait se situer au sud de Toul ar Ster, vers Groaik6 ar Ster près du point : 47 47 33 N, 04 19 05 W.

1 Andro Mireille Les fontaines dans le sud-ouest du pays bigouden (Le-Guilvinec, Penmarc’h, Treffiagat-Lechiagat, Saint-Jean-Trolimon, Plomeur, Treguennec) 1994.CRBC Cote: M-05979-00

2 Eteule, partie du chaume, passée sous la lame de la faux ou de la moissonneuse, qui reste fixée à la terre après la moisson. Wiktionnaire

6 Gwrac’h : vieille femme ou, dans les légendes, sorcière ou sirène.