1866 L’épidémie de choléra au Guilvinec

Une visite des autorités de l’Etat

Le 21 avril, trois jours après le début de l’épidémie, le Commissaire de l’Inscription maritime de Quimper se rend au Guilvinec pour évaluer la situation sanitaire du petit port. Il est accompagné du Secrétaire général, remplissant les fonctions de Préfet par intérim et du médecin des épidémies.
Deux dépêches télégraphiques reçues à la Préfecture annoncent que le choléra s’est déclaré d’une manière foudroyante au Guilvinec parmi la population des pêcheurs et parmi les équipages des 200 ou 300 bateaux de Douarnenez, Audierne et Concarneau qui font la pêche au maquereau dans ces parages.
A leur arrivée, ils trouvent une situation très grave de terreur généralisée répandue dans la population ; ceux des pêcheurs qui ont des parents ou des amis en dehors de la localité déménagent en abandonnant leur maison.
Le 18, on commence à charger sur des charrettes bon nombre de marins de Douarnenez atteints du fléau pour les transporter dans leur quartier. Neuf d’entre eux sont morts dans le trajet ; le lendemain, 19 avril, le même fait a lieu et 6 meurent en route. Le 20, il ne reste plus un seul pêcheur étranger au Guilvinec dont la population a déjà perdu 13 personnes en deux jours.
12 à 15 cholériques ont été visités par le médecin et sont bien malades. Une vingtaine d’autres personnes sont également allées le consulter, n’ayant encore que les premiers symptômes du mal ; mais il craint que le choléra ne se déclare complètement pendant la nuit. Les personnes atteintes sont enlevées en 6 heures généralement et deux femmes sont mortes pendant le séjour des représentants de l’Etat au Guilvinec.

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Matricule de Joseph Le Cléac’h, mort du choléra le 19 avril 1866 à 37 ans, laissant une veuve avec trois enfants de 8, 4 et 2 ans (Doc SHD Brest)

Des mesures pour enrayer l’épidémie

Quelques mesures d’hygiène sont donc nécessaires : le Commissaire de l’Inscription maritime va charger un marin venant du service de faire la police dans le port pour empêcher que soient jetés sur la grève les cadavres de gros poissons qu’on pouvait voir là, en putréfaction.
Il engage les marins à donner la main au maire pour recouvrir de sable les nombreux tas de goémon formant fumier devant presque toutes les maisons.
Enfin, il leur conseille de boire un peu moins, car il constate une chose pénible : tous les hommes sans exception sont ivres d’eau-de-vie, près du lit de leurs femmes ou de leurs enfants, décédés ou moribonds. Les marins se plaignent beaucoup de la qualité de l’eau-de-vie que leur donnent comme prime les marchands de poissons, mais malheureusement cela ne les empêche pas de la boire quand même. Le représentant du préfet a pris note de leurs réclamations et verra ce qu’il y aura à faire pour empêcher la vente de cette boisson.
La préfecture du Finistère ayant demandé un chirurgien de marine au Préfet maritime de Brest, il a fallu lui trouver un local, ce qui a été fait difficilement avec une maison tout juste conforme à son activité. Avec l’arrivée de ce chirurgien et de deux sœurs, en plus de la dispersion de la population, le Commissaire de l’Inscription maritime espère pouvoir circonscrire le fléau en donnant des soins très prompts à tous ceux qui pourraient être atteints et de peut-être les sauver.