Archives de catégorie : Arts

Brest “Dans les pas de Jim Sévellec” aux Capucins

Expo Jim Sévellec 2023

Artiste majeur de la Bretagne du 20e siècle, Jim-E. Sévellec (1897-1971) est intimement lié à Brest, sa ville d’adoption. Son œuvre, qui conjugue art et histoire, nous fait partir à la découverte de paysages disparus du Brest d’avant-guerre. Homme de mémoire, impliqué dans la transmission aux jeunes générations de ce passé perdu, Jim Sévellec a autant enrichi le patrimoine brestois qu’il a participé à le défendre. L’exposition rend hommage à cette figure brestoise, à travers un parcours inédit.

Cette exposition est proposée par le service Musées-Patrimoines de la Ville de Brest dans le cadre du label « Ville d’art et d’histoire », à la médiathèque François Mitterrand – Les Capucins, du 27 juin au 17 septembre 2023, tous les jours de 10h à 18h. L’entrée est libre.

A suivre, le jeudi 21 septembre 2023 à 18 heures, Salle Yves-Moraud, Faculté Victor Segalen, UBO Brest (Entrée libre) :

  • Présentation du Hors-série n° 11 des Cahiers de l’Iroise consacré à l’artiste Jim-E. Sévellec
  • Jim-E. Sévellec,peintre brestois par excellence, une conférence par Armel Morgant
  • Séance de dédicaces de l’ouvrage Jim-E. Sévellec. L’Esprit du pays d’Armel Morgant paru aux éditions Locus Solus
Expo Jim Sévellec 2023 : Armel Morgant


Après le loup, SKYBAN dans les Monts d’Arrée

Sorte de sniper, de franc-tireur, il n’a pas de nom. On le connaît seulement sous le pseudonyme de SKYBAN. De nombreux usurpateurs tentent en vain de laisser croire qu’ils sont les auteurs — géniaux, bien évidemment — des tags qu’il sème un peu partout. Cependant, lassé des villes et du béton, il a choisi de sévir sur le grès armoricain et les schistes des Monts d’Arrée.

On se demande même si SKYBAN n’est pas le diabolique auteur du feu qui a ravagé les alentours de Menez Mikel, le Mont Saint-Michel de Brasparts. Il est vrai que l’incendie a révélé de nombreux murs en pierres blanches aux faces idéales à taguer avec la quantité industrielle de bâtons de lande calcinés en guise de bombes, mais aussi plus écologiques, car les tags seront effacés par la moindre pluie.

Les gens du pays redoutent cependant son retour, probablement à Saint-Rivoal dans son antre, un manoir ayant appartenu à un de ses ancêtres, le Comte de Cornec, soupçonné un temps d’avoir gravé les rochers de la pointe du Caro à Plougastel-Daoulas à la fin du XVIIIe siècle, alors qu’il se cachait après son évasion du Fort du Corbeau où il était emprisonné pour (déjà) faux en écritures.

En réalité, à Saint-Rivoal, tout le monde sait que l’héritier de la maison Cornec s’appelle Paolig, tout comme le Comte. Tous deux ont aussi en commun la passion des voyages. En effet, lointain cousin du sulfureux Jakez Kerouac, originaire quant à lui du Huelgoat, le graffeur SKYBAN, né comme lui aux USA, a toujours été un adepte de la route. « Chi va piano, va sano e va lontano », le slogan d’un autre lointain cousin, le talentueux Didier “Ploudalman”, grand spécialiste des concerts dans les chapelles.

Revenu aux sources — de l’Elorn — après un passage remarqué, mais incognito, dans la grande ville de Brest, SKYBAN arpente aujourd’hui, comme les anciens pilhaouerien, déguisé en moine capucin, le chemin du Comte afin de trouver les spots adéquats pour y inscrire ses créations de land’art éphémères et y laisser sa signature en noir sur blanc.

Et la nuit, quand l’Ankou rôde, Paolig SKYBAN se fond dans son ombre avec ses bâtons calcinés. Tous ici espèrent cependant la protection de l’Ange Exterminateur qui devrait réintégrer bientôt la chapelle Saint-Michel sur son promontoire.

Et d’affirmer en chœur : “Bec’h dezhi d’an diaoul a lak tan ! Sus au diable qui met le feu ! Et si on l’attrape, il ira directement au frigo calmer ses ardeurs dans l’enfer froid de l’ossuaire de La Martyre ! An Ifern yen !

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Daoulas : le Printemps des poètes 2023, c’est parti !

42 panneaux, associant Photographie et Poésie sur le thème national du Printemps des Poètes : Frontières viennent d’être installés le long de la ria de Daoulas, de fin avril à fin septembre.

Le vernissage et l’inauguration de l’exposition auront lieu le samedi 13 mai à la salle Kerneis.

Le programme de la journée est le suivant:

10h Atelier Écriture

14h00 Inauguration (participation d’élèves)

15h Balade Poétique

17h Dédicaces (Louis-Jacques Suignard puis Vaslo en intermède musical)

18h /19h30 Buffet-Apéritif

20h30 Concert Vaslo Entrée 10€

Serge Aubrée : Recouvrance perd son dernier Ami

Autoportrait de Serge Aubrée présenté à l’exposition Alternance à la maison de la Fontaine en octobre 2010

Serge Aubrée vient de refermer son dernier carnet de voyage, de Brest à Brest, en passant par Recouvrance, entamé voilà près de 95 ans. Nous perdons un grand Ami, avec un grand A, mais aussi un artiste de premier plan, un passeur de mémoire incomparable du quartier de Recouvrance.

J’ai rencontré Serge Aubrée pour la première fois en 1991 à Saint-Marc lors d’un vernissage de l’association Artitude, présidée par son ami Jean-Yves Madec. A partir de ce moment, les rencontres ont été de plus en plus fréquentes, tout spécialement lors d’expos collectives organisées par la FOL du Finistère, Artitude, les Amis de Recouvrance, l’APB ou en collaboration avec la Ville ou l’Éducation Nationale (Mois de la Science).

Serge entre Jean-Louis Magnier et Charles Kérivel lors de l’exposition ” 25 Figures”
organisée par Artitude à la Mairie de Saint-Marc

Parmi celles-ci, quelques-unes auxquelles j’ai pu participer :

  • 1992 L’Air, le Vent
  • 1993 Les Matériaux
  • 1995 Fotographisme. C’est à cette occasion que l’APB m’a proposé de rejoindre son collectif d’artistes plasticiens.
  • 1996 “Brest 96”
  • 1997 La Biodiversité
  • 1997 “Carte blanche” à Guilers
  • 1999 Art Média
  • 2000 Juillet, 2000 bateaux pour Brest 2000
  • 2001 Utopie en bleu
  • 2001 Mai, Biozart, marché bio de Kérinou à Brest.
  • 2002 Les Îles
  • 1998,1999,2000,2001, A tout sport, Parc de Penfeld à Brest.

L’APB, c’était une grande famille, riche de nombreux talents, de personnalités très diverses, qu’il fallait parfois faire cohabiter. Mais, au bout du compte, tous arrivaient toujours à se mettre d’accord sur des projets plastiques, chacun y apportant sa contribution avec ses qualités artistiques et créatives. Le résultat était toujours surprenant et innovant.

L’expo “Jacadi” à la mairie de Lanester en 1999 : Arlette Fouyer, Brigitte Simon, Jean-Yves Madec, Joëlle Thibault, Anne Smith, Claude Péron.

J’ai fait la connaissance des Amis de Recouvrance en 1992 lors de l’exposition Yves Collet à la Maison de la Fontaine, qui venait d’être rénovée par la Ville, juste avant les premières Fêtes maritimes. Comme il n’était pas question de déplacer ou de mettre sous vitrines les registres concernant le sculpteur de la marine, ancien propriétaire du lieu, la seule solution était d’en reproduire les pages en question. Vu leur taille, il n’était pas possible de les photocopier, il ne restait qu’une solution, la reproduction photographique.

Et donc, me voilà en mission au SHD, avec une fine équipe de recouvrançais, équipé d’un statif de reproduction et rampes d’éclairage à 45°, un film noir et blanc spécial « lumière artificielle » dans mon Canon. Une anecdote : sur une des photos, agrandie par Robert Gernot, on voit deux doigts, ceux de Serge qui tient la feuille du registre pour l’empêcher de s’enrouler. La légende veut que ce soit la main de Yves Collet qui est réapparue à cette occasion.

Quand je suis rentré à l’APB, en 1995, j’ai appris qu’un certain nombre de ses adhérents avaient participé aux Salon d’art contemporain organisés par l’UAPB de Claude Cléro et Bernard Peschet au Guilvinec, expositions que j’ai assidûment fréquenté pendant ma jeunesse. Il y avait là Serge, Jean-Yves Madec, Maurice Le Meur, Yves Bonraisin, … voisinant avec Picasso, Bazaine, Léger, Vasarely, Fromanger, Alechinsky ou encore Ernest Pignon-Ernest.

L’inauguration de la place René Le Saëc (1935-1999), face à son atelier et aux Halles de Recouvrance, là ou Serge et René avaient créé une grande fresque, a été un événement important après le décès de ce compagnon de toujours. J’ai eu le grand plaisir de répondre positivement à l’invitation des Amis de Recouvrance pour couvrir l’événement en photos. Le dévoilement de la plaque en présence de nombreuses personnalités dont Pierre Maille et François Cuillandre aura lieu avant le vernissage, dans la foulée, d’une rétrospective des œuvres de René à la Maison de la Fontaine. Serge était très fier de la réussite de la cérémonie d’hommage et a créé un album de photos pour que le souvenir de son ami perdure. La mémoire des hommes était pour lui quelque chose d’important, ce qu’il n’a cessé de nourrir avec Cécile Bramé et les Amis de Recouvrance.

Serge et Jean-Yves m’avaient fait l’honneur en 1994 de venir rencontrer mes élèves à l’école des Hauts de Penfeld pour leur parler, chacun avec leur sensibilité picturale, de leur vision du paysage en peinture.

Au niveau professionnel, j’ai également eu très souvent l’occasion d’organiser des visites avec ma classe à la Maison de la Fontaine. Serge m’a souvent fait remarquer qu’il appréciait par dessus tout le fait de me voir arriver chaque fois un mercredi après-midi avec appareil photos, bloc à dessin et crayons pour préparer les fiches que j’allais proposer aux enfants pour bien s’imprégner de l’exposition lors de la visite.

De cette manière, active et ludique, ils allaient pouvoir exploiter plus facilement ces contacts avec des œuvres d’artistes. Ce n’était pas le cas de toutes les classes qui y venaient, m’a-t-il avoué : « Certains enseignants viennent là en touristes avec leurs élèves et je me demande ce qui peut bien en rester par la suite. »

En 2002, il a pu être témoin direct d’une de ces visites, car l’artiste exposant était aussi l’instit de CM2. La Ville avait organisé la traditionnelle conférence de presse le jour fixé pour cette sortie. Gaétan Le Guern, adjoint à la Culture était présent, la presse aussi (Guy Pellen du Télégramme) et la radio (RCF). Là où Serge est resté « baba », c’est quand mes propres élèves m’ont également interviewé, avec des questions préparées à l’école. Un moment rare et inoubliable.

Œuvre exposée en décembre 2008

En décembre 2008, hospitalisé pendant trois mois en chirurgie à la Cavale Blanche, j’ai eu la grande surprise, en recevant le carton d’invitation sur mon lit d’hôpital, d’apprendre que Serge m’avait programmé dans l’exposition qu’il organisait avec les Amis à la Maison de la Fontaine. Il avait choisi deux travaux photographiques que je lui avais offerts, les avait encadrés et mis au mur. Mieux, il avait utilisé l’une des images pour illustrer le carton d’invitation et l’affiche de l’expo ! Son geste d’amitié m’avait profondément touché vu les circonstances.

En 2009, nous avons également participé à l’aventure du collectif d’artistes non-conformistes « Actus-Cactus » avec Yvon Daniel, JJ Petton, Marc Morvan, Aurélie Kerouanton, Emma de Lafforêt, … Nous nous réunissions dans le local des Amis de Recouvrance, aimablement mis à disposition par Serge.

Chez Yvon Daniel lors des journées portes ouvertes d’artistes organisées par le Conseil Général du Finistère.

Une autre réalisation de Serge et Cécile a été le projet de sculpture de Jean Quem et Fanny, réalisé par Jérôme Durand, sculpteur de Recouvrance. Une œuvre qui évoquera à jamais pour les passants la substantifique moelle de l’esprit recouvrançais.

Lors de la présentation à la Mairie de quartier de Quatre-Moulins
Jean Quem et Fanny

Serge, s’il était passionné, était surtout, du fait de sa profession d’artisan-décorateur, quelqu’un d’exigeant. Exigeant avec lui-même et les autres, il faut l’avoir vu préparer une exposition avec son équipe des Amis. Rien n’était laissé au hasard : tout devait être propre, clair et net ; la minutie et la précision faisaient partie de son savoir-faire, des qualités caractéristiques des ouvriers compagnons.

S’il appréciait au plus haut point les « faiseurs » et ceux qui innovaient en faisant preuve de créativité, il n’aimait pas les beaux parleurs, les gens superficiels. Serge était curieux de tout et s’intéressait aux domaines qu’il ne pratiquait pas et suscitait par ses questions des échanges toujours positifs. Son rapport aux institutions n’a pas dû être un long fleuve tranquille. Il s’accrochait à ses convictions fortes pour faire avancer les projets menés par les Amis ; on peut imaginer les discussions argumentées avec le Service Culture de la Ville concernant la gestion de la Maison de la Fontaine. Au bout du compte, sa ténacité a permis à tous de bénéficier d’un accueil et d’une programmation artistique de qualité dans ce lieu historique et patrimonial.

Cependant la plus grande qualité de Serge c’est son humanisme qui se traduisait par une amitié durable, mais qui se méritait.

Serge et Arlette Aubrée lors des 50 ans de Bellevue sur les rives de Penfeld

Cahier de l’Iroise 239 : Objectif Brest

L’Abeille en son miroir, décembre 1995 © Claude Péron

Au sommaire :
Dominique DERRIEN Éditorial – Dans un album de famille…
Claude PÉRON La photographie à Brest – 1849-1945
Jean-Yves GUENGANT Geneviève Élizabeth Francart-Disdéri, entre oubli et reconnaissance
Emmanuel BURLION Ils ont photographiés Brest : Joseph-Émile Mage (1836-1908)
Claude PÉRON René-Victor et Émilienne Boëlle, photographes et éditeurs
Claude PÉRON Inizan-Bocoyran, un siècle de photographie
Béatrice LAGACHE-ROBERT Grenier Photo, un siècle d’histoire
CAPAB Du CAPAB à Pluie d’Images, petite histoire d’un festival photographique
Alain UGUEN Le Musée breton de la photographie et du cinéma
LE CHOIX DE LA RÉDACTION
Gilles CARDINAL La difficile réalisation du boulevard de la Marine
Patrick GOURLAY Poincaré et Lebrun à Brest : deux présidents sur le front naval (1918 et 1940)
et votre habituelle rubrique Voir et Lire
CONTACTS & INFOS societe.etudes29@gmail.com
Numéro en vente 25 € à la Librairie Dialogues
32 € (port compris) sur le site de la SEBL

L’île aux artistes

J’avais lu quelque part qu’il existait, sur la côte du Pays des Abers, une île connue pour accueillir régulièrement des artistes. De quoi attiser ma curiosité ! Mais, un peu incrédule, comme Saint-Thomas, il m’a fallu me rendre sur place pour vérifier l’information. Comment un caillou, ponctuant cette côte, comme des dizaines d’autres disséminés en vrac par une main géante dans cette mer inhospitalière pour les marins, pourrait-il accueillir des artistes et leurs œuvres ?

C’est à un véritable jeu de piste à la Sherlock Holmes que je me suis livré pour aboutir à une découverte majeure. Pour en savoir plus, je vous propose de refaire avec moi le trajet qui m’a mené jusqu’à ce lieu de lumière, magnifique et magnifiée, où des artistes se sont amusés, comme les grecs anciens, à écrire avec de la lumière.

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